Insolite

Pervitin® : une amphétamine au service des armées

Comment expliquer l’invasion nazie, qui a surpris l’Europe toute entière, à l’aube de la Seconde Guerre mondiale ? Se pourrait-il qu’une aide médicamenteuse ait été proposée en plus du discours habité et vénéré d’un dictateur et d’une propagande intrusive ? Des soldats auraient-ils pu être dopés ?

La réponse est oui ! Et pour cause : près de 200 millions de comprimés de Pervitin® ont été délivrés de 1939 à 1945 aux soldats allemands de la Wehrmacht. L’objectif : maintenir les troupes en continuelle alerte, et éviter les « coups de faiblesse ». Leur existence n’est pourtant pas secrète, étant donné que les « Panzerschokolade[1] » font l’objet de nombreuses mentions dans les échanges épistolaires, tout droit venus du front.

On[2] rapporte notamment l’histoire et le témoignage d’un soldat allemand, envoyé au combat : Heinrich Böll. A partir des lettres signées « H.B », de nombreux effets indésirables faisaient déjà l’objet d’inquiétudes, et sont rapportées ainsi :

« Viele konnten gar nicht mehr anders – sie ware süchtig nach dem Mittel, die Substanz hatte sie längst abhängig gemacht ».

Traduction : “Beaucoup ne pouvaient rien (faire) d’autre – ils étaient accros au médicament, la substance les ayant rendus dépendants depuis longtemps”.

Mais au-delà de la « simple » dépendance, des accidents cardiovasculaires ou des troubles psychotiques éclatèrent au sein des rangs militaires, provoquant la mort subite de plusieurs soldats dans les zones de combat. Une prise de conscience qui a remonté jusque dans les instances nazies en charge de la santé des armées, à l’origine d’une réduction sensible de la distribution de Pervitin®, au profit de nouvelles substances à tester, parmi lesquelles des stimulants dérivés de la cocaïne, par exemple.

Dernière question à laquelle répondre : quelle substance active pouvait bien contenir les comprimés de Pervitin® ? De la méthamphétamine, bien entendu ! Assez insolite, finalement, d’imaginer le troisième Reich comme un réseau de dealer de drogues à l’échelle nationale, non ? Substances qui, d’ailleurs, seront destinées à devenir des molécules à usage récréatif, notamment dans le milieu de la fête et de la nuit …

Pour finir, l’ouvrage cité propose une satire incisive des troupes nazies, les résumant à :

« Im Grunde zog Nazideutschland also mit einem Heer von Junkies durch Europa ».

Traduction : “L’Allemagne nazie a ainsi envahi l’Europe avec une armée de Junkies”.

 

Source : Robson Steve, « Nazis on narcotics : How Hitler’s henchmen stayed alert during war by taking Crystal Meth ».

[1] En allemand, signifie littéralement « chocolat de tank ».

[2] Roland Härtel-Petri, Heiki Haupt, « Crystal Meth : Wie eine Drogue unser Land überschwemmt ».

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