Interview de Mme Willer-Wehrle

Bonjour Mme Willer-Wehrlé, et merci d’accueillir l’équipe du Comprimé dans la toute nouvelle pharmacie expérimentale de la faculté.

Pour ceux qui ne vous connaissent pas encore, pourriez-vous vous présenter et nous présenter votre parcours universitaire ?

Je suis pharmacienne, diplômée de la Faculté de Pharmacie de Strasbourg, J’ai aussi un Diplôme Universitaire d’orthopédie, une attestation de dermopharmacie ainsi qu’une attestation de pharmacien Responsable Assurance Qualité (PRAQ)

Au niveau professionnel, j’exerce depuis 25 ans en tant que pharmacienne adjointe et depuis 2007, je suis également professeur attaché en service temporaire (PAST) en pratique officinale à la faculté de Pharmacie. À ce titre, je suis responsable de la pharmacie expérimentale. Dans d’autres facultés, les étudiants participent à la gestion de la pharmacie expérimentale.

Ce poste est accessible sur concours pour tous les pharmaciens adjoints, pour une durée de 3 ans et est renouvelable 3 fois. C’était d’ailleurs impressionnant de devoir passer à 44 ans devant un jury composé de nombreux professeurs de la faculté ! Mon poste vient d’ailleurs d’être renouvelé pour 3 ans !

Par ailleurs,je suis vice-présidente de l’association des pharmacies expérimentales APPEX qui regroupe les professeurs responsables de la filière Officine et les professeurs attachés en pratique officinale des différentes facultés de France. Cela nous permet de voir comment est enseignée cette matière dans les autres facultés, il y a aussi des partenariats avec des facultés à l’étranger permettant ainsi sans cesse d’améliorer cet enseignement.

Pouvez-vous nous présenter la pharmacie expérimentale dans laquelle nous nous trouvons ?

La première pharmacie expérimentale a été créée en 2004 par Mme Clavert (qui occupait le premier poste de pharmacien attaché à la pratique officinale) avec le soutien de M. Pesson (responsable de la filière officine). J’ai pris sa succession en 2007.

C’est un concept qui se développe de plus en plus dans les différentes facultés de France. Les pharmacies ainsi créées sont très diversifiées. Par exemple, à Marseille, c’est une grande pharmacie à la vue de tous, séparée du hall d’accueil par une baie vitrée, dans d’autres facultés ce sont des petites salles avec simplement quelques boîtes de médicament vides.

Ici, à Strasbourg, nous sommes bien équipés, avec une toute nouvelle salle depuis la rentrée, je tiens d’ailleurs à remercier le personnel technique de la faculté qui s’est démené pour que tout soit installé dans les temps, et mon mari pour certains aspects techniques et informatiques comme la réinstallation du DP (dossier pharmaceutique).

La pharmacie comporte de nombreux présentoirs, des échantillons que les laboratoires nous offrent, du matériel orthopédique, des ordinateurs avec les logiciels les plus utilisés…

Les différents domaines de la pharmacie d’officine sont présents : le conseil avec des médicaments sans ordonnance, en libre accès ou non, des armoires à tiroir avec des boîtes vides de médicaments listés , des produits vétérinaires, de la phytothérapie, de l’aromathérapie, de l’orthopédie et aussi de la parapharmacie et de la dermocosmétique.

Nous avons également des partenariats avec diverses facultés françaises et étrangères (Cracovie, Monastir, Montréal …) qui nous permettent d’échanger nos points de vue. Il est d’ailleurs intéressant de voir sur le terrain les particularités officinales de différents pays et ensuite d’en retenir les meilleurs points pour améliorer la prise en charge du patient à l’officine en France.

Cette pharmacie est-elle utilisée uniquement par les étudiants en officine ?

Effectivement, elle sert principalement aux élèves de la filière officine dès la 4ème année jusqu’à leur examen de 6ème année. Cette salle sert également aux ED d’allemand appliqués à l’officine en 5ème année en plus des ED de pharmacie pratique(hypertension, asthme, insuffisance veineuse…). Elle sert autant pour les cours, que pour les examens oraux que les élèves passent au courant de leur cursus, mis en situation au comptoir. Une journée du diabète avec l’utilisation de tous les lecteurs de glycémie sur le marché officinal y est organisée chaque année. Elle sera également ouverte au public lors de la journée portes ouvertes des Universités du 12 mars 2011.

Quels en sont les perspectives de développement ?

Ce ne sont pour l’instant que des projets qui doivent être encore approuvés par la faculté, mais j’aimerais à terme changer le mobilier actuel (tables et chaises) pour le remplacer par des chaises pliables avec un pupitre rabattable, ce qui permettrait de moduler l’espace dans la salle et ainsi d’augmenter sa capacité d’accueil (il y a actuellement une vingtaine de places alors que la plupart des groupes sont plus nombreux).

J’aimerais également installer une caméra (comme celle de l’amphi Laustriat), afin de filmer les étudiants au comptoir pour qu’ils puissent analyser leur comportement face à des situations qui peuvent se présenter lors de leur pratique officinale. Je rassure tout de suite les futurs étudiants : ces vidéos resteraient bien sûr au sein du groupe de TD.

Je crois qu’il est très enrichissant et formateur de se voir au comptoir, on voit nos défauts et on peut donc s’améliorer.

La caméra serait aussi utile lors du concours de commentaire d’ordonnance auquel les étudiants de la faculté participent chaque année.

Justement pourriez-vous nous parler de ce concours ?

C’est un concours qui est organisé chaque année au niveau national. Il a lieu au même moment dans chaque faculté de pharmacie de France. Les étudiants commentent la même ordonnance, en étant filmés. S’ils sont sélectionnés au niveau de leur faculté leur film est soumis un jury central, à Paris, qui décerne le prix national. Je fais actuellement appel à un vrai professionnel de la caméra M. Serge Dumont pour filmer les étudiants, j’en profite pour le remercier sincèrement pour son aide !

Avez-vous des retours de la part des pharmaciens concernant cette fameuse pharmacie ?

De nombreux pharmaciens connaissent cette pharmacie expérimentale car son développement est soutenu par l’association des Maîtres de Stage et de nombreux étudiants en parlent lors de leurs stages. J’espère d’ailleurs que cet article permettra de la faire découvrir aux quelques pharmaciens qui ne la connaissent pas encore !

D’ailleurs, lors de réunions à la faculté et lors de soutenances de thèses, certains pharmaciens demandent à visiter cette salle et sont étonnés de la qualité de l’outil pédagogique !

Pouvez-vous nous parler du prix “communication officine”, où la faculté de Strasbourg brille régulièrement ?

C’est un concours national qui est organisé par l’UTIP, l’APPEX et l’Ordre des pharmaciens. Il concerne les étudiants en 5ème année officine et son but est de créer une affiche sur un thème de santé publique (arrêt du tabac, obésité, asthme… ) qui pourrait théoriquement être affichée dans une officine afin de sensibiliser le grand public. Certains professionnels du monde de la publicité sont d’ailleurs étonnés de l’excellente qualité des affiches conçues, et ce malgré l’absence de cours de publicité ! Cela faisait deux ans de suite que notre faculté obtient le 2ème prix (cf numéro 30 et 34 du Comprimé). Malheureusement, en 2010 nous avons été moins performants. Le sujet de cette année est « la prise en charge du patient asthmatique à l’officine », bonne chance aux étudiants de la faculté de pharmacie de Strasbourg !

Pourriez-vous nous parler de l’UE destinée aux étudiants souhaitant rejoindre la filière officine au cours de leur cursus ?

Avec M. Pesson, responsable de la filière officine, nous avons mis en place une U.E spécifique pour les étudiants souhaitant changer de filière en cours de parcours. Cela concerne les étudiants qui étaient en filière internat et qui ont échoué à leur concours, ainsi qu’aux étudiants de la filière industrie.

Il sont alors inscrits en 6ème année officine lors du premier semestre et ils doivent valider les UE spécifiques de 5ème année officine au second semestre, ils décalent leur stage officinal de 6ème année qu’ils font alors de juin à novembre !

Je crois que le choix de créer cette UE est une bonne chose car j’ai moi même suivi le cursus internat avant de me tourner finalement vers l’officine. J’ai été diplômée mais j’ai eu l’impression de ne pas être assez formée à ce métier en sortant de la faculté. Cette UE permet à ces étudiants réorientés d’avoir des enseignements de la filière officine.

Certains lecteurs se demandent si les discussions lors du dîner avec M. Wehrlé sont plutôt axées galénique ou officine ?

Il est vrai qu’au départ nous parlions beaucoup de pharmacie à table, surtout depuis que je travaille à la faculté. Mais depuis quelques temps nous évitons d’en parler car nos enfants en ont assez, ils nous le rappellent régulièrement (rires). Il nous reste les trajets en voiture pour aborder ces sujets qui nous passionnent tous les deux.

Justement est-ce que cela vous a aidé d’avoir un mari à la faculté lorsque vous avez commencé à enseigner?

Oui, effectivement cela m’a beaucoup aidé. Comme vous le savez, je suis pharmacienne d’officine de carrière et je n’ai pas eu de formation spécifique pour l’enseignement. C’était donc très enrichissant d’avoir quelqu’un à ses côtés qui a de l’expérience dans ce domaine.

Cela m’a également permis de suivre l’évolution de l’enseignement de la pharmacie depuis la fin de mes études car lorsqu’on travaille, on ne peut pas être au courant de toutes les réformes du programme.

De plus, c’est intéressant d’avoir le point de vue d’un expert en galénique car cela permet de mieux cerner l’importance de ce domaine et donc d’en faire part à mes étudiants et cela leur servira dans leur exercice officinal quotidien. Mon mari fait par exemple des cours en 3ème année sur les dispositifs d’inhalation utilisés dans le traitement de l’asthme pour le côté pharmacotechnie et moi pour le côté prise en charge du patient asthmatique en 5 ème année officine.

Enfin terminons par la question traditionnelle concernant le banquet, y êtes-vous déjà allée ? Y allez-vous avec M. Wehrlé ?

J’y allais en tant qu’étudiante, j’y suis allée avec mon mari lorsqu’il a été nommé professeur à Strasbourg, mais je l’ai trouvé quelque peu trop sollicité par certaines étudiantes…

Pour finir souhaiteriez-vous faire passer un message aux étudiants en première année ? Quels arguments pourriez-vous avancer pour qu’ils choisissent la voie de la pharmacie et plus spécifiquement la filière officine ?

Les études de pharmacie sont faites d’enseignements à la fois universitaires et professionnalisant, ce qui les rend très attractives. Pour le pharmacien d’officine il s’agit de vulgariser son savoir universitaire de haut niveau afin de se mettre au service des patients, et ce avec empathie et psychologie. La profession est en ce moment à un véritable tournant avec la loi HPST, les fonctions du pharmacien d’officine vont certainement beaucoup changer et la pharmacie expérimentale est un excellent outil pour se préparer à ces changements !!

Un grand merci à Mme Willer-Wehrle de s’être prêtée au jeu des questions-réponses !

Hélène et Ludovic

Le Comprimé Numéro 38 printemps 2011

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